Fête illégale – «A Rodange, des gens sont arrivés de partout»

Publié

Fête illégale«À Rodange, des gens sont arrivés de partout»

RODANGE - Paul* était avec plusieurs dizaines de jeunes à la soirée clandestine interrompue, samedi dernier, par la police. Il parle d'une jeunesse «volée» par le Covid.

La soirée à Rodange a rassemblé cent personnes selon la police. Beaucoup moins estiment les participants.

La soirée à Rodange a rassemblé cent personnes selon la police. Beaucoup moins estiment les participants.

AFP

Rodange c’était «une soirée #31# qui a fuité». Dièse 31 dièse: le préfixe d’un appel masqué» un code pour parler des soirées «anonymes», raconte Paul. Samedi dernier, ce frontalier français travaillant au Luxembourg dans l’Horeca, actuellement en chômage partiel, faisait partie des quelques dizaines de jeunes présents lors de la soirée clandestine interrompue par la police vers 0h30, en plein couvre-feu, à Rodange.

Un rassemblement brisant les règles sanitaires alors qu'il est interdit d'avoir plus de deux invités. «La police a parlé de cent personnes, mais c’était beaucoup moins, déclare-t-il. C’est comme pour Virton, dans le sud de la Belgique, cela n’avait rien à voir avec ce qui avait été décrit. Ça peut briser des familles».

«Ils ont voulu organiser une soirée privée, vraiment privée et avec le bouche à oreille et les réseaux sociaux ça va tellement vite, ça a débarqué de tous les sens, c’était ingérable. C’est peut-être pour ça que la police a été appelée». Sur place, mercredi, des voisins assuraient avoir vu un peu de passage mais «pas entendu grand-chose», avant l'intervention de la police. Certains jeunes auraient pris la fuite en traversant des jardins à l'arrière.

C’est le Covid, il n’y a rien à faire

Paul, lui, assure qu’il est sorti «normalement» par devant. Selon lui, la police aurait dit «vous avez cinq minutes pour quitter la maison». Filmée, la réplique d'une jeune aux policiers a fait le buzz sur les réseaux sociaux. Quand le policier a demandé qui est le responsable? Elle a répondu: «On est tous responsables».

Paul était arrivé vers 22h30 à cette soirée, «avant le couvre-feu ». Informé, car inséré dans le monde de la nuit, il s'est laissé tenter. «Je me suis installé. J’ai bu mon petit verre et la police est arrivée. On n'a même pas eu le temps de faire la fête», dit-il. Le jeune homme assure qu’il ne connaissait pas le propriétaire des murs qui aurait ouvert sa maison à l'organisateur pour célébrer un anniversaire «à rattraper. Cela devait être en comité restreint. Et ça a fuité et voilà. Les copains des copains se sont invités. C’est le Covid, il n’y a rien à faire. Les gens parlent, ils sont sur les réseaux sociaux et ils vont là où ils peuvent essayer de s’amuser».

Chicha, musique, boisson et nourriture gratuite, et d'après lui pas d’entrées payantes. Tous n'avaient pas de masque. «Il y avait les distanciations c’était correct jusqu’au moment où moi-même j’ai dit attention. Ça sonnait, ça sonnait, ça sonnait. J’ai pensé, ça risque de déborder et ça n’a pas loupé». Une soirée «cosmopolite comme le pays, un mélange de frontaliers français, belges, de Luxembourgeois, de Capverdiens, d’Africains».

Une soirée qui fait du bruit

Paul assure que c’était sa première soirée de ce type mais est convaincu qu’il y en a certainement eu d’autres. «C’est obligé. Si le #31# est respecté...». Évoquant cette jeunesse qui s'estime «volée». «Vous voulez qu’ils fassent quoi les jeunes?». Pour lui, des gens impactés par la crise pourraient «vouloir organiser des soirées pour essayer de faire de l’argent». Et cela alors que des amendes de 4 000 euros, doublées en cas de récidive, sont prévues pour les établissements ne respectant pas les règles sanitaires.

Pour tenter d'expliquer ces fêtes illégales, il invoque le flou autour du virus et des mesures prises. «Des gens ont des symptômes, d’autres pas. On ne sait pas ce qui se passe derrière. Certains n’y croient plus. Ils sortent. (...) Pourquoi ne fermer que le secteur Horesca? Dans les supermarchés les gens touchent à tout, les écoles sont ouvertes. On ne comprend pas». Quant au jugement des autres? «Cela ne me dérange, pas lance-t-il. Je fais ce que je fais. Le Luxembourg c’est un petit pays, les gens aiment bien parler. Certains sont pour, d’autres contre. Je sais ce que je fais. Il y a des choses que je prends à la légère».

La police enquête sur la soirée et a transmis un rapport au ministère de la Santé. Le parquet pourrait être saisi. Elle a dressé un procès-verbal à l'encontre du propriétaire des lieux. Des soirées du même type avaient eu lieu ces dernières semaines à l'étranger. Celle de Rodange révélée lundi, par la police, a depuis fait grand bruit au Luxembourg et fait réagir jusqu'aux soignants du CHL, alors que l'épidémie peine à reculer.

*le prénom a été modifié.

(Nicolas Martin/L'essentiel )

Ton opinion