«C'est différent du suicide, on a le temps de faire ses adieux»
LUXEMBOURG - Les députés décident mardi soir s'ils autorisent
l'euthanasie au Grand-Duché. Témoignages de personnes face à un choix sans retour.

«Si quelqu'un veut mourir, il va mourir», raconte un témoin. (editpress)
À la fin, elle ne pouvait plus parler avec ses enfants et plus rien ne l'intéressait. Pas un livre, pas une émission de radio ou de télévision. Alors ils ont préféré ne «pas s'acharner». En concertation avec les médecins, ils ont doucement laisser partir leur mère. «Parce que si quelqu'un veut mourir, il va mourir».
Dans les textes de loi, cela s'appelle l'euthanasie passive: les médecins arrêtent un traitement qui prolongerait la vie. Malgré la douleur de ce choix, «la décision a été facile à prendre» raconte ce témoin. «Maman souffrait tellement».
Une ambivalence que comprend la psychothérapeute Lisy Krieps. «Il y a ce refus de voir l'autre souffrir et l'envie de rester encore un peu ensemble». La Luxembourgeoise est psychothérapeute aux Pays-Bas, où l'euthanasie active est légale. Elle a accompagné des familles confrontées au choix d'un proche d'être euthanasié. «C'est tout à fait différent du suicide. Dans l'euthanasie, le seul choix de la personne, c'est d'anticiper le moment de la fin de la souffrance. Les familles vivent souvent ce moment de façon très intense. Elles ont le temps de faire des adieux et sont en paix avec celui qui part. Un suicide reste figé dans la douleur».
Paradoxalement, c'est toutefois toujours la souffrance, intolérable, quia déclenché la décision chez un malade d'être euthanasié, a pu constater Lisy Krieps: «Il n'y a pas d'hésitation après la prise de décision». Le rapport à la mort serait différent aux Pays-Bas par rapport au Luxembourg. «On en parle et c'est donc beaucoup plus naturel». Notre témoin luxembourgeois acquiesce: «Ici, c'est un tabou. Il faut que les gens acceptent que la mort fait partie de la vie». Il se tait. «Vous ne me nommez pas, hein, je ne voudrais pas que l'on reconnaisse ma famille».
Isabelle Hartmann