Surirradiations d'Epinal – La «souffrance» des victimes surirradiées

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Surirradiations d'EpinalLa «souffrance» des victimes surirradiées

EPINAL - De 1987 à 2006, 4 500 malades traités à l'hôpital d'Epinal par radiothérapie ont été exposés à des doses anormales. Une affaire jugée à partir de lundi à Paris. Des victimes témoignent.

Le centre hospitalier Jean Monnet, à Epinal, où des erreurs de manipulation sont à l'origine d'accidents de radiothérapie.

Le centre hospitalier Jean Monnet, à Epinal, où des erreurs de manipulation sont à l'origine d'accidents de radiothérapie.

AFP

«Aujourd'hui, tout n'est que souffrance et mal de vivre», souffle Michel Noël, l'une des victimes de surirradiations à l'hôpital d’Épinal, qui attend «que les responsables reconnaissent leur faute» lors du procès du plus grave accident de radiothérapie en France. «Mon état d'esprit avant ce procès, il n'est pas bon, mais tout ce que j'espère, c'est que les responsables reconnaissent leur faute et qu'ils soient condamnés», ajoute M. Noël, 63 ans, qui a suivi un traitement du cancer de la prostate par radiothérapie à l'hôpital d'Epinal à la fin 2005. «Après ce traitement, je suis allé voir un urologue parce que ça n'allait pas. Il m'a tout de suite dit: "Ils ne vous ont pas raté". Je vis avec une poche gastrique et je n'ai plus de rapports sexuels, plus rien, c'est très pénible», raconte le retraité qui se rendra au procès, au tribunal correctionnel de Paris, «au moins quelques jours».

Pour les dizaines d'autres parties civiles, souvent diminuées, la justice a autorisé une retransmission des audiences au tribunal d'Epinal. Des accidents successifs dans cet hôpital entre 1987 et 2006 ont touché au moins 5 500 patients même si le procès concernera moins de 500 cas. Sept sont décédés des suites des surirradiations. Henri Bento, 62 ans, le trésorier de l'association des victimes de surirradiations de l'hôpital d'Epinal (AVSHE, plus de 500 adhérents) veut «voir les responsables en face de nous».

Rectum et vessie brûlés

Des années après, «on a toujours une épée de Damoclès au-dessus de la tête, on se demande combien de temps ça va durer», s'interroge le sexagénaire, qui a eu «le rectum, 10 cm d'intestin et une partie de la vessie brûlés» par les surirradiations. «J'ai reçu 34 séances de rayons, sans avoir de symptômes. Puis j'ai eu du sang dans mes selles et dans mes urines. L'hôpital m'a d'abord dit que je n'étais pas concerné par l'accident de surirradiation, avant de me proposer une indemnisation", soupire-t-il.

«Moi, je l'ai su en écoutant la radio et en voyant ça dans le journal», renchérit Joseph Lethumier, 76 ans, surirradié à plus de 7%. «Tous les vendredis, je recevais une dose supplémentaire, "pour vérifier que le traitement allait bien là où il devait aller", me disaient-ils. C'est après que d'autres médecins se sont rendu compte qu'ils avaient largement dépassé la dose». «Tous les Vosgiens connaissent quelqu'un de leur entourage qui a été soigné dans cet hôpital», souligne Philippe Stabler, président de l'AVSHE.

Sept prévenus seront jugés à partir de lundi, jusqu'au 31 octobre, dont deux médecins et un radiophysicien pour homicide et blessures involontaires notamment. A leurs côtés, l'hôpital d'Epinal en tant que personne morale, sa directrice, le directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation de Lorraine et la directrice de la Ddass de l'époque comparaîtront pour omission de porter secours. L'enjeu du procès n'est pas financier puisque, rappelle Me Gérard Welzer, avocat des parties civiles, environ 500 personnes ont été indemnisées de leur préjudice corporel par l'assurance de l'hôpital. «Notre statut de victimes a été reconnu par ce biais. Une société d'assurance qui accepte de verser plusieurs millions d'euros, ce n'est certainement pas pour rien», remarque Philippe Stabler, qui veut croire que l'argument pèsera devant le tribunal correctionnel.

(L'essentiel Online/AFP)

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