Piraterie«Nous n'arrivons plus à contrôler la situation»
De nombreuses attaques sont enregistrées chaque mois au large des côtes nigérianes. La piraterie est depuis longtemps un risque majeur dans cette partie de l’océan Atlantique.
Le Mozart, se trouvait à 320 kilomètres des côtes du Nigeria, lorsque les pirates ont lancé leur assaut, leur bateau filant à travers les eaux du golfe de Guinée, pour dépasser le porte-conteneur. Des hommes armés ont grimpé à bord laissant à peine le temps à l’équipage turc de s’enfermer à double tour dans leur «citadelle», un espace sécurisé prévu en cas d’attaques.
Durant six heures, les pirates ont utilisé des outils trouvés sur le navire pour forcer la porte de sécurité. Une fois la «citadelle» assiégée, ils ont tué un des matelots et en ont kidnappé quinze, qu’ils ont ramenés sur la terre ferme en vue d’obtenir une rançon.
Piraterie, risque majeur
Cette attaque, survenue en janvier, n’est qu’une parmi les nombreuses qui sont enregistrées chaque mois au large des côtes nigérianes. La piraterie est depuis longtemps un risque majeur dans le golfe de Guinée, une route commerciale longeant les côtes d’Afrique de l’Ouest, du Sénégal à l’Angola.
Les transporteurs maritimes affirment que les pirates se sont professionnalisés et ont étendu leur présence, attaquant désormais des navires en haute mer. Cette situation les pousse à réclamer une présence navale étrangère renforcée, comme celle déployée il y a dix ans au large de la Somalie. «J’ai perdu toute ma patience», souffle Jakob Meldgaard, le directeur du groupe danois Torm en charge d’une flotte de pétroliers. «Nous devons nous rendre à l’évidence, nous ne contrôlons plus la situation». L’année dernière, plus de 95% des enlèvements recensés en mer ont eu lieu dans le golfe de Guinée, selon le Bureau international maritime.
Attaques sophistiquées
Les pirates profitent de la faible capacité navale du Nigeria et des présences étrangères dans ces eaux pour agir en quasi-impunité, affirment à l’AFP des transporteurs et des sources militaires occidentales. L’exemple du Mozart montre comment ces pirates n’ont pas peur de rester plusieurs heures sur les lieux de l’attaque, affirme Munro Anderson, du cabinet en sécurité maritime Dryad.
«Ils ont travaillé durant six ou sept heures pour forcer la porte», a raconté l’ingénieur en chef du Mozart qui avait réussi à échapper aux pirates durant l’attaque. Les 15 matelots enlevés ont été libérés en février après trois semaines de captivité. Des pirates nigérians ont aussi utilisé un bateau de pêche chinois comme base pour rester au large plus longtemps et attaquer d’autres bateaux, selon le cabinet Dryad. Face à ces tactiques plus sophistiquées, il faut un changement de stratégie, plaident plusieurs lobbies de transporteurs danois, indien ou encore chypriote.
Le Nigeria a récemment dépensé près de 165 millions d’euros pour son projet naval «Deep Blue», investissant dans du matériel de surveillance, des navires et des avions. Le chef de l’agence maritime du Nigeria, Bashir Jamoh, espère que ce système sera pleinement opérationnel d’ici le mois prochain, et fait pression pour plus de coordination dans la région.
(L'essentiel/afp)