France/Grand EstUn village de 740 âmes accueille 80 migrants
FERRETTE - Depuis 2016 malgré l'hostilité des habitants, ce village alsacien accueille en permanence des Soudanais, Afghans ou Kosovars, dont la moitié d'enfants.

«La population, très réfractaire au départ, a vu que cela se passait bien, que c'était des gens discrets, qui se cachaient plutôt que d'être virulents», se réjouit le maire.
AFPAu pied de son château médiéval ou aux détours de ses rues escarpées, on ne s'attend pas à croiser des Érythréens ou des Tchétchènes. Pourtant, dans le village alsacien de Ferrette, les demandeurs d'asile représentent plus de 10% de la population. Alors que dans toute l'Europe, l'accueil des migrants fait débat à un mois des élections européennes, à Ferrette, le maire (sans étiquette) François Cohendet souhaite que leur présence «ne soit pas un événement, que cela reste dans la vie normale de la commune».
Un défi pour ce village de 740 habitants niché à la frontière suisse, tout au sud de l'Alsace, une région où l'extrême droite recueille des scores conséquents. Depuis 2016, Ferrette accueille en permanence quelque 80 demandeurs d'asile, Soudanais, Afghans ou encore Kosovars, dont la moitié d'enfants, dans l'attente de la délivrance éventuelle d'un statut de réfugié ou de la protection subsidiaire de la France. «On m'avait dit que l'Alsace était un coin où il y avait du racisme mais je n'en ai pas souffert», confie, tout sourire, le Congolais Djoe Kabuka.
Hostilité des habitants
Seuls inconvénients de Ferrette selon lui, le manque de transports et la nécessité d'aller jusqu'à Mulhouse pour trouver les produits alimentaires auxquels les demandeurs d'asile sont habitués. Et «ici, il fait très froid et très chaud!», s'amuse Abundance, adolescente nigériane. Pourtant, lorsque, après la dissolution d'un escadron de gendarmerie en 2015, le maire avait accepté la proposition de la préfecture de reconvertir une caserne en Accueil temporaire service de l'asile (AT-SA), il s'était heurté à une vive hostilité d'une partie de ses administrés.
«Zéro migrant à Ferrette», «on est chez nous», «submersion migratoire»: dans une pochette cartonnée, M. Cohendet conserve de nombreux courriers et tracts, parfois très violents. «La population, très réfractaire au départ, a vu que cela se passait bien, que c'était des gens discrets, qui se cachaient plutôt que d'être virulents», se réjouit-il aujourd'hui, trois ans après l'arrivée des premiers pensionnaires, «deux Soudanais, la peau noire, en tongs sous la neige».
Dans un duplex aux murs jaunes un peu défraîchis, une famille sri lankaise fraîchement arrivée avec ses jumeaux de 3 ans et un adolescent de 14 ans partage la cuisine avec une Arménienne et son fils de 17 ans. Les espaces verts de l'ancienne caserne fourmillent de vie. «On les intègre dans la vie locale, à la journée citoyenne, au 14 juillet, au réveillon...», complète Elisabeth Schulthess, présidente de «Voisins d'Ailleurs».
(L'essentiel/afp)